
« Je ne suis pas convaincu que les gens qui écoutent MusiquePlus aujourd'hui sont des amateurs de clips. C'est des jeunes qui veulent voir des vedettes, etc. » croît Gabriel Allard-Gagnon. Réalisateur de la boîte Núfilms qui a notamment laissé sa griffe sur le clip « Les Princesses ” du Volume Était Au Maximum, Allard-Gagnon constate lui aussi l'impact des nouvelles technologies sur son art. « Faut encore considérer MusiquePlus, mais de plus en plus on entend des gens dire “Hey man, on va ramasser de l'argent pour un clip pis on va mettre ça un peu partout sur le Web!”
Alors que l'appareillage semi-professionnel à la minidv est de plus en plus abordable, des vidéastes de tout acabit tournent et expérimentent davantage. Comme si ce n'était pas assez, la popularité grandissante de services à la YouTube permet à ces créateurs de rejoindre encore plus de public. »Écoutes, moi je suis réalisateur de vidéoclips et je n'ai même pas le câble chez nous! » poursuit Gabriel. « À mon sens, c'est maintenant excessivement facile avec les blogues ou MySpace de voir et de se faire référer à des trucs originaux et dignes d'intérêt. C'est rendu un véritable phénomène! Disons qu'à Tokyo, un gars sort un vidéo. Si c'est hot, il va faire le tour du monde sur l'Internet en une semaine! »
La « simplicité volontaire » émanant habituellement de ce genre de web création est une esthétique gagnant aussi en popularité sur les chaînes musicales câblées comme en témoigne un exemple de chez nous : le clip « Véronique » de Trois Gars sur le sofa qui est autant populaire sur la Toile que sur la station de télévision rendue célèbre par Paul Sarrazin (oui, oui). Tourné devant un mur blanc, le trio joue tout simplement de plusieurs instruments. Pas de vikings, ni de véhicules futuristes à la Tron, que des garçons grattant leur guitares et cognant sur des tambours en faisant des drôles de grimaces. « Leur clip demeure intéressant» analyse Gabriel (qui a été associé un projet jusqu'à ce que les instances gouvernementales refusent d'octroyer de l'argent au groupe). « Y' a une idée relativement bonne en arrière de ça en plus de jouir d'une certaine “coolness” naturelle. Le phénomène derrière ce vidéoclip part beaucoup plus de ça que de sa qualité. » Ainsi, ce genre de vidéo – lorsque réalisé admirablement – pourrait autant servir de carte de visite auprès des grosses huiles que d'un outil promotionnel pour charmer le public. « Maintenant qu'il y a un “buzz” autour des Trois Gars, on s'est fait dire de réappliquer pour la bourse, car ils voient maintenant que l'intérêt est là! »
Quand ce n'est pas le manque de financement qui freine des projets vidéo, c'est les politiques internes des stations qui mettent des bâtons dans les roues des créateurs. « MusiquePlus, à la base, est très frileuse » poursuit Allard-Gagnon. « Par exemple, pour le clip de Télémaque que j'ai fait : même s'ils aimaient la toune, le concept et le clip, on s'est fait dire que la toune faisait trop “adulte”! »
En attendant de considérer de futurs projets avec des formations comme Polipe et Jacquemort, Gabriel Allard-Gagnon continue de faire des compromis entre les rêves de ses clients et la réalité du milieu « On est allé faire un vidéo en Alberta l'été dernier pour Pascale Picard. » se remémore-t-il. « Pour arriver à un produit qui est commercial pis qu'y'a un potentiel international, on a dû passer une semaine à dormir dans le char pis à tourner des 20 heures par jour! Au Québec, on n'a peut-être pas d'argent, ni tant de ressources, mais on a des idées et de l'énergie! » Amen!