Dur à croire qu’un album concept si pointu se retrouve sur un des « majors »! Deux ans après avoir livré le disque le plus pop de sa carrière, l’icône iconoclaste du hip-hop canadien revient sur scène en empruntant le parcours habituel : le plus sinueux. Car en plus de déposer dans les bacs un énième compact, Richard Terfry échafaude une véritable capsule temporelle dédiée à l’année 1957. Alors que nos voisins du Sud grognaient en lisant Ginsberg et ses potes beatniks une journée, ils scrutaient le ciel le lendemain, de peur de recevoir Sputnik 1 en pleine gueule. Situation marque aussi le retour à des rythmiques plus accentuées (outre l’« Iggy Popesque » « Kennedy Killed The Hat », sa précédente offrande ne « swinguait » pas fort, fort). Tandis que l’explosive « Dang » carbure aux bongos, « Way Back Then » est soutenue par une mélodie de synthétiseur surfant dangereusement la mince ligne entre le « lounge » et le « kitsch ». Aventurier tout de même prudent, Terfry voyage dans le temps en compagnie d’acolytes de choix. En plus de pouvoir compter sur les bons soins de Skratch Bastid aux platines, Richard mène aussi sa Guerre Froide avec la sensation Cadence Weapon sur le brulot « Benz ». Sans être l’œuvre la plus significative de son impressionnante discographie, Situation est un album obligatoirement « old school » rafraîchissant tout en demeurant un exercice de style plus concis que tape-à-l’œil. Bref, une galette autant recommandée aux amateurs de rap de champ gauche qu’aux grands-parents qui voudraient revivre leur jeunesse… genre.